En ce début de l’an 2025, Me Alice Nkom a fort à faire. Elle aen effet été inscrite sur plusieurs tableaux de chasse par le régime en place. Déjà convoquée par le préfet du Wouri pour bris de scellés, elle vient de nouveau de l’être par le Secrétariat d’Etat à la Défense, le tristement célèbre SED.
Cette dernière l’a entendue pour enquête, sur dénonciation d’une obscure Organisation dénommée « Observatoire du Développement Sociétal » (ODS). Dans une missive en date du 18 décembre 2024 au Tribunal Militaire de Yaoundé, ODS affirme en effet que « depuis le 3ème Forum du CameroonPatriotic Diaspora, tenu en juillet 2019 à Munich, dame Alice Nkom et consorts, ont réuni des fonds colossaux pour s’opposer au gouvernement en place. Par ailleurs, ces derniers financent par des envois de fonds, des bandits armés, séparatistes dans les Régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. En outre (ils) composent un gouvernement pour évincer les dirigeants actuels et projettent mettre le peuple camerounais à la rue ».
La plainte se poursuit par ce que ODS considère comme des preuves de ses allégations qui seraient contenues dans deux vidéogrammes transmis au Tribunal, en même temps que la plainte. De fait, cette association apparait comme un véritable bras séculier du régime. En effet, elle fut par le passé utilisée comme base de rampement des torpilles contre le MRC de Maurice KAMTO.
Il n’en fallait pas plus pour que le Tribunal Militaire se mette en branle pour ouvrir une enquête. En date du 20 janvier 2025,il vient d’auditionner Me Alice Nkom. Me Meli Hyppolite son conseil, parle de plus de 5 heures d’audition. Il faut signaler que dans sa plainte, ODS demande la poursuite de Me Alice Nkom pour trois chefs d’accusations :
- Tentative d’atteinte à la sureté de l’Etat ;
- Financement du Terrorisme ;
- Financement des bandes armées.
Rien moins que ça !!!
Dans notre pays, de telles condamnations sont souvent sanctionnées par de lourdes peines d’emprisonnement, voire la peine capitale. Le but en réalité de cette manœuvre, est de faire taire toute voix importante, toute voix discordante de la société civile. Me Alice Nkom et Maximilienne Ngo Mbe, avaient, en son temps, dénoncé avec véhémence, les fraudes électorales, lors de la présidentielle de 2018.
Le pouvoir en place a dès lors, mis en branle, contre ces dernières, un processus de musèlement, une véritable vendetta contre ces voix dissonantes. L’on douterait encore d’un tel argument si le timing choisi pour lancer ce qui apparaît comme une véritable fatwa contre Alice Nkom et Maximilienne Ngo Mbe, n’était pas anodin. Nous sommes en effet, à l’aube d’une année nouvelle, d’une année électorale, avec des élections présidentielles prévues pour octobre de cette année.
L’opération du Ministre de l’Administration Territoriale consistant à lancer des enquêtes auprès des ONG, apparait à postériori, comme une manigance visant le bâillonnement de la société civile. Cette manœuvre de torpillement visait en réalité, le Réseau d’Organisations de Défense des Droits de l’Homme en Afrique Centrale (REDHAC). Un bilan de cette opération de « checking » du MINAT suffit à le démonter. De la centaine des ONG et associations visées au départ, seuls 3 sont rentrées dans le collimateur du MINAT.
Il s’agit en dehors du REDHAC, de l’Association Charitable Socio-culturelle du Cameroun et de Reach Out Cameroun . Sur ces trois structures « suspendues » pour trois mois, une seule a connu l’apposition des scellés à savoir le REDHAC. C’est dire qu’en réalité, la « suspension » de trois mois valait en réalité fermeture définitive de l’ONG. La mesure du MINAT constitue dès lors, un moyen détourné pour sceller le sort du témoin gênant que constitue le REDHAC, à l’aube d’une année électorale. Au moment où nous rédigeons ces lignes, nous apprenons qu’une opération de vandalisme a eu lieu au siège pourtant scellé du REDHAC, où ordinateurs, et autres disques durs contenant des informations institutionnelles de cette ONG ont été emportés.
On peut très bien imaginer qui sont les responsables derrière ces actes d’intimidation. Me Alice Nkom, PCA du REDHAC et Maximillienne Ngo Mbe, coordonnatrice de cette ONG, se retrouvent ainsi, bien malgré elles, entre la moulinette nationale du MINAT et le rouleau compresseur d’une justice militaire aux ordres.
L’écrivaine Caroline Meva fine observatrice de la vie politique de notre pays, définit ainsi le rouleau compresseur, stratagèmebien connu du public, théorisé et mis en place dans les années 1990 par les sécurocrates du régime. Elle le décrit comme « …un mécanisme de destruction mis en place par certains membres de l'establishment pour se débarrasser d'une cible devenue gênante, sous le prétexte fallacieux de faire respecter les lois et règlements de la République, par l'instrumentalisation de l'institution judiciaire. La cible est, généralement, une personnalité publique, un haut responsable de l'Etat qui, par son action ou son inaction, porte atteinte aux intérêts politiques ou économiques de certains membres de l'establishment et qui, de ce fait, menace l'équilibre du système de pouvoir mis en place ».
Ce « rouleau compresseur » a déjà envoyé en prison ou ad patres plusieurs fils et filles de ce pays, au travers d’arrestations arbitraires, de faux procès, d’intimidation et de condamnations fallacieuses, en vue du maintien au pouvoir de l’ordre régnant. Me Alice Nkom et Maximilienne Ngo Mbe, constituent dès lors, les énième victimes de ce système iconoclaste, cynique et inique, observable uniquement dans les Républiques bananières.
TIENTCHEU KAMENI Maurice
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