Alors que la grande majorité des camerounais, du moins pour ce qui croient encore au changement s’attendaient à voir de nouvelles personnes aux perchoirs de ces deuxchambres du parlement.
Ce 22 mars 2024 était jour d’élection des bureaux de l’Assemblée nationale et du Sénat. Aux perchoirs des deux chambres, ont respectivement été réélus, le très honorable Cavaye Yeguie Djibril, âgé de 84 ans pour ce qui est de la chambre basse et, Marcel Niat Njifenji, 90 ans pour ce qui est de la chambre haute.
Le changement tant attendu par certains observateurs de la scène politique camerounaise n’est donc pas finalement arrivé. Une fois de plus, une fois de trop, le président national du Rassemblement démocratique du peuple camerounais ( Rdpc),par ailleurs chef de l’État, Paul Biya a décidé d’opterpour le statut quo anté. Rien de nouveau sous le soleil, pourrait- on alors dire. En clair, celui qui détient le pouvoir de par la loi de faire et défaire les destins a montré aux yeux du monde qu’il fait encore confiance à ses vieux amis. Ses thuriféraires ne disent-ils pas qu’il est très fidèle en amitié.
Cette énième reconduction de Cavayé et Niat apparaissant alors comme un autre pied de nez du tenant central du pouvoir qui a démontré à travers ce geste qu’il préfère continuer avec ces personnalités alors qu’elles présentent des signes d’épuisement physique(rien de surprenant au regard de leurs âges).
Pourtant, bien avant ces élections des bureaux des deux chambres du parlement, les signaux laissaient croire qu’il y aura un renouvellement à la tête de ces deux institutions. Beaucoup de noms ont d’ailleurs circulé dans la presse, avec des bons profils. Que nenni, on a plutôt assisté à unereconduction des mêmes. Il s'agit là d’une situation affligeante qui vient une fois de plus démontrer pourquoi le parlement camerounais est le siège par excellence de l’inertie distillée par ses porte étendards qui ne parviennent plus à impulser une dynamique nouvelle. Pourtant, de nombreux Camerounais s’attendaient à un réel changement qui peut préfigurer d’un abandon de l’inertie pour un parlement qui assume réellement ses missions et ne se contente pas seulement à être une chambre d’enregistrement.
À l’Assemblée nationale, par exemple, de nombreux indicateurs semblaient démontrer que le fil de confiance est désormais coupé entre le député du Mayo-Sava et le sommet de l’État. Certains observateurs prétendant pour les uns être dans les secrets des Dieux, avec la force des arguments,affirmant même que « cette fois ci c’est la bonne, sauf cataclysme ». Le débarquement du monarque de Mada selonces derniers n’était plus qu’une question de temps car il ne serait plus en odeur de sainteté avec le fils de Mvomeka’a.
Des arguments qui ne manquent pas de plausibilité et de pertinence, si l’on s’en tient à la dernière décision du chef de l’État interdisant le forum de haut niveau que Cavaye avait voulu organiser sur une prétendue famine dans le septentrion. À cela s’ajoute les tentatives infructueuses de rencontrer le président de la République en tête à tête de ces dernières années. La dernière fois que le PAN, au perchoir depuis 1992, aurait eu ce privilège remonte à 2013.
Également, à en croire certaines autres indiscrétions, le très honorable ne serait pas en odeur n’est plus très apprécié de certains hiérarques proches du chef de l’État. Lesquels sont d’après les défenseurs du garant des traditions de Mada à l’origine de la froideur des relations entre les deux hommes. In fine, dans ses rapports avec les autres élites du grand Nord, le PAN ne serait plus l’homme du consensus. En témoigne les nombreuses récriminations des élites de cette partie du pays au sujet du forum qu’il voulait organiser le 14 février dernier à Maroua.Suffisant pour acter son débarquement de la tête de cette institution qui est devenue, au regard de sa gestion, une propriété familiale.
Pour ce qui est du sénat, c’est là où la plus grande curiosité a été observée. Marcel Niat Njifenji a été réélu nonobstant son état de santé devenu fragile et son âge très avancé. Il est revenu en cascade au Cameroun alors qu’il séjournait dans un hôpital, de l’autre côté de l’hexagone.
Il a été sorti de son lit d’hospitalisation pour qu’il aille se faire réélire. Bien dupe est celui qui pense le contraire. Pour preuve, il a fallu attendre 17 jours après le début de la session parlementaire pour procéder aux élections des membres des bureaux alors que cela aurait pu se faire juste après le lancement des travaux par les doyens d’âge le 05 mars dernier. L’indisponibilité du président de la chambre haute étant à coup sûr à l’origine du retard des choses.
Autant le dire, la reconduction des présidents des deux chambres du parlement vient remettre au goût du jour, la sempiternelle question du renouvellement de la classepolitique qui s’impose au fil du temps. A moins que les camerounais se soient remis à la disposition de dame nature qui est le véritable régulateur.
Julien Efila
hum