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Cosmétiques au romarin

Cameroun : le bambou, nouvel allié pour restaurer les terres dégradées

En raison de sa croissance rapide, de sa capacité à fixer l’azote et de son rôle dans la séquestration du carbone, cette plante s’impose comme une solution durable pour la préservation des écosystèmes et l’amélioration des conditions de vie des populations rurales.


Face à la dégradation accélérée des sols et à l’érosion, le Cameroun mise sur le bambou pour restaurer ses terres abîmées. Depuis l’interdiction en 2016 de l’exploitation des bois de perche au Cameroun, en application des recommandations de l’Accord de Paris sur le climat, le bambou a progressivement pris le relais dans plusieurs domaines, notamment le bâtiment et l’artisanat. Mais au-delà de ces usages, cette plante à croissance rapide est devenue un levier essentiel de la restauration des sols dégradés. « Le bambou est une ressource précieuse pour stabiliser les sols et lutter contre l’érosion », affirme Angèle Wadou, sous-directrice de la biodiversité au ministère de l’Environnement.

Grâce à son système racinaire dense et profond, il retient la terre, réduit la perte des nutriments et protège les berges des cours d’eau, comme en témoigne le projet pilote mené sur les rives du fleuve Bénoué entre 2018 et 2020.


Contrairement aux idées reçues selon lesquelles le bambou appauvrirait le sol, de nombreux experts soulignent au contraire ses bienfaits agronomiques. Séverine Etounou, chercheure à l’Institut de recherche agricole pour le développement (Irad), insiste sur l’apport nutritif de ses feuilles. « En se décomposant, elles libèrent une forte quantité d’azote, enrichissant ainsi le sol et favorisant la repousse d’autres espèces végétales », explique-t-elle.

A Avebe, un village situé à 20 km de Mbalmayo dans la région du Centre, Sébastien Tchebayou, ingénieur des Eaux et Forêts à la retraite, expérimente cette culture depuis quatre ans. « J’ai remarqué que mes plantations sont plus résistantes et que la terre conserve mieux son humidité grâce aux bambous », témoigne-t-il.


Un puits de carbone naturel

En plus de son rôle dans la préservation des sols, le bambou est un allié majeur dans la lutte contre le changement climatique. Selon les chercheurs, il séquestre plus de dioxyde de carbone que les arbres traditionnels et produit une quantité importante d’oxygène. « Plus il grandit, plus il capte le CO2 de l’atmosphère, avec une efficacité bien supérieure à celle des espèces ligneuses classiques », détaille Séverine Etounou.

Dans le cadre de ses engagements internationaux, notamment l’Engagement de Bonn, le Cameroun ambitionne de restaurer 12 millions d’hectares de terres dégradées d’ici 2030. Pour y parvenir, le gouvernement, avec l’appui de partenaires comme l’Organisation internationale pour le bambou et le rotin (Inbar) et le Fonds pour l’environnement mondial (Fem), finance des projets de reboisement et de développement de la filière bambou sur l’ensemble du territoire.


Des défis à relever

Malgré ses nombreux atouts, la culture du bambou reste confrontée à plusieurs défis. La pénibilité du travail, la rareté de la main-d’œuvre et le coût du matériel nécessaire freinent son expansion. « Le bambou est une plante dure qui use rapidement les outils. J’ai du mal à trouver des ouvriers prêts à s’investir dans cette activité », confie Tchebayou. Pour surmonter ces obstacles, des initiatives de formation et d’appui technique sont mises en place par des Ong comme Forêts et développement rural (Foder).

À Avebe, TchamakéMbappé, agricultrice, a suivi un mois de formation pour apprendre à gérer une pépinière de bambou. Mais elle doit encore faire face à la difficulté d’irrigation, surtout en saison sèche.


En intégrant pleinement le bambou dans ses stratégies de reforestation et de conservation des sols, le Cameroun fait un pari audacieux sur l’avenir. En plus de protéger les terres contre l’érosion et de restaurer leur fertilité, cette plante contribue à la séquestration du carbone et ouvre des perspectives économiques pour les populations locales. Reste à structurer davantage la filière pour en exploiter tout le potentiel.


Alain Leuwat

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