Cameroun : les avocats en grève pour dénoncer les violences policières
- Alain Leuwat
- 6 mars
- 2 min de lecture
Face à la recrudescence des violences et humiliations infligées par les forces de l’ordre, le Barreau du Cameroun a décidé de suspendre toute activité judiciaire du 5 au 7 mars 2025.

Les tribunaux camerounais sont à l’arrêt. Depuis ce mercredi 5 mars, les avocats ont déserté les salles d’audience, suspendant toute activité judiciaire pour trois jours. Une décision radicale prise en réaction aux actes de brutalité policière dont certains membres du Barreau ont été victimes ces temps derniers. Un mouvement de contestation qui vise à exiger justice pour leurs confrères agressés et à dénoncer la dégradation continue du respect de leur profession.
Tout est parti d’une vidéo devenue virale sur les réseaux sociaux, montrant un avocat soumis à un traitement dégradant par des éléments des forces de l’ordre. Une séquence qui a ravivé le ressentiment d’une profession qui se sent de plus en plus marginalisée et violentée dans l’exercice de ses fonctions. La veille, un autre avocat avait été séquestré après avoir dénoncé des violations des droits de ses clients, contraints à se rétracter sous la pression.
Face à cette situation, le Conseil de l’Ordre des avocats, sous la direction du Bâtonnier Me Mbah Eric Mbah, a pris une série de décisions fortes : engager des poursuites judiciaires contre les auteurs de ces actes, suspendre le port de la robe et boycotter les tribunaux pour marquer le mécontentement général. Une mesure de protestation qui vise non seulement à obtenir réparation pour leurs confrères violentés, mais aussi à exiger un meilleur respect de leur statut et de leur rôle dans le système judiciaire.
Un mal profond et persistant
Cette grève s’inscrit dans un contexte de tensions anciennes entre les avocats et les forces de l’ordre. Depuis le début de la crise anglophone en 2016, les avocats dénoncent la brutalité policière et les entraves à leur mission de défense des justiciables. En 2019 déjà, une grève similaire avait été observée en protestation contre des violences physiques subies par des robes noires. Le Barreau pointe du doigt un harcèlement constant et une banalisation des abus commis contre ses membres. « Nous voulons montrer aux autorités publiques que nous sommes en colère contre la façon dont elles nous traitent en ennemis. Nous ne sommes pas au-dessus des lois, mais nous exigeons respect et dignité », a déclaré Me Tamfu Richard, membre du Conseil de l’Ordre.
Le mouvement de contestation impacte lourdement le fonctionnement des tribunaux. De nombreuses audiences sont ajournées, notamment celles impliquant des accusés nécessitant une représentation légale. Le Conseil de l’Ordre espère, à travers cette mobilisation, provoquer une prise de conscience chez les autorités et obtenir des engagements fermes pour la protection des avocats dans l’exercice de leur profession.
Alain Leuwat
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